Rome est une ville riche en symboles. De la louve qui a allaité ses fondateurs jumeaux, Romulus et Remus, à l’aigle tendu qui symbolise les vastes étendues territoriales de l’Empire romain, de nombreux symboles romains ont traversé les siècles pour devenir partie intégrante de notre culture visuelle collective. Cet article examine certains des symboles les plus connus de l’histoire romaine et présente quelques faits intéressants sur leur origine, leur utilisation et leur signification.
1. L’aigle (Aquila)
Peu de symboles représentent Rome avec autant de force que l’aigle. Perché au sommet de l’étendard légionnaire, les ailes déployées, cet oiseau de chasse féroce représentait l’étendue de l’Empire romain.
À l’origine, les Romains apposaient plusieurs symboles au sommet de leurs étendards. Outre l’aigle, ils utilisaient le loup, le cheval, le sanglier et le bœuf à tête humaine. Après la défaite catastrophique de Rome à la bataille d’Arausio et le remaniement radical de l’armée romaine par Gaius Marius en 104 avant J.-C., les Romains ont abandonné ces autres symboles (signa manipuli, comme on les appelait) pour ne conserver que l’aigle.
La perte d’un étendard à aigle au cours d’une bataille était considérée comme l’humiliation suprême, et les Romains se donnaient beaucoup de mal pour les récupérer. C’est ce qui s’est passé en 53 avant J.-C., lorsque l’armée romaine de Crassus a été écrasée par les Parthes lors de la bataille de Carrhae. Les Romains ont subi une double humiliation : plusieurs étendards légionnaires ont été capturés et Crassus, avide de nature, s’est fait verser de l’or fondu dans la gorge.
Auguste finit par récupérer les étendards, affichant son exploit sur le plastron de sa statue Prima Porta, aujourd’hui conservée dans les musées du Vatican. Mais alors que sa propagande présentait la récupération de cet important symbole de l’histoire romaine comme une victoire militaire, la réalité était qu’il avait dû envoyer son meilleur général, Tibère, supplier les Parthes de lui rendre les étendards.
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Ce ne fut pas non plus la seule tentative d’Auguste pour récupérer les étendards perdus. Après la défaite écrasante de Rome contre les tribus germaniques à la bataille de la forêt de Teutoburg en 9 après J.-C., Auguste et ses successeurs ont passé des décennies à rechercher les étendards perdus. Le dernier n’a été retrouvé que sous le règne de Claude, en 41 après J.-C., et a probablement été placé dans le temple de Mars le Vengeur, dans le Forum d’Auguste.
L’aigle est resté l’un des principaux symboles de l’histoire romaine et l’emblème de l’armée, même après l’arrivée du christianisme comme religion officielle au IVe siècle de notre ère. L’arc de Constantin – l’empereur qui a adopté le christianisme comme religion impériale – présente de tels exemples sur son attique sud (le côté que l’on voit lorsqu’on se trouve face au Colisée ou au Belvédère du Colisée).
L’arc de Constantin
De même, au XIe siècle, alors que la capitale impériale s’était depuis longtemps déplacée de Rome à l’ouest vers Constantinople à l’est, l’empereur Isaac Ier Kommenos adopta comme symbole l’aigle bicéphale, représentant la domination de l’Empire romain à la fois sur l’Orient et sur l’Occident.
2. La louve (Lupa)
Docile en temps de paix mais féroce lorsqu’elle est provoquée, la louve est le symbole par excellence de Rome et de son Empire. Elle remonte à l’histoire de Romulus et Remus, deux jumeaux originaires d’Alba Longa (aujourd’hui Castel Gandolfo). Lorsque leur grand-père, le roi Numitor, fut chassé du trône par son frère Amulius, l’usurpateur ordonna que les jumeaux en bas âge soient jetés dans le Tibre.
Comme toujours dans la mythologie antique, l’homme chargé de l’infanticide se rendit compte qu’il ne pouvait pas aller jusqu’au bout. Au lieu de les noyer dans le fleuve, il les abandonne sur la berge, sauvées d’abord par l’intervention du dieu Tibernus, puis par une louve exceptionnellement maternelle qui passait par là.
Élevés dans sa grotte (le Lupercal), les jumeaux ont été allaités par la louve jusqu’à ce qu’un berger de passage, Faustulus, les trouve et les ramène à sa femme. Ils élevèrent alors les jumeaux ensemble jusqu’à ce qu’ils soient assez âgés pour retourner à Alba Longa, rétablir leur grand-père sur le trône et accomplir leur destin en fondant Rome. Du moins, pour Romulus…
L’histoire de la louve circulait depuis longtemps avant que les Romains ne commencent à écrire quoi que ce soit. L’historien Tite-Live, de l’époque augustéenne, nous apprend qu’en 295 avant J.-C., une statue semblable à celle que l’on trouve dans les musées du Capitole se dressait au pied du Palatin.
Pline l’Ancien, encyclopédiste mort lors de l’éruption du Vésuve qui ensevelit Pompéi en 79 après J.-C., nous apprend également qu’une statue de la louve allaitant Romulus et Rémus se dressait sur le Forum romain. Dans l’Antiquité déjà, le symbole de la ville était très répandu.
Une théorie récente suggère cependant que nous nous sommes peut-être trompés.
Le mot latin lupa a en fait deux significations. Le premier sens du mot est « louve » et fait référence à l’animal lui-même. Le second sens du mot lupa est « prostituée » et fait référence aux bruits que faisaient les dames de la nuit de la ville antique pour attirer les clients de passage.
Visitez Pompéi et vous comprendrez le lien. Le bordel de la ville antique s’appelait le Lupanar ou « tanière des loups ». En fait, toutes les maisons closes de la Rome antique portaient ce nom latin.
Il est donc possible que lorsque nous disons que Romulus et Remus ont été élevés par une lupa, nous ayons plutôt mal compris l’histoire de leur éducation (ou, avec le temps, nous avons exagéré l’histoire de leur enfance dans un bordel).
Pourtant, la louve reste la figure principale du symbole. En tant qu’emblème de l’A.S. Roma, l’une des deux principales équipes de football de la ville, elle apparaît partout, en particulier dans le Testaccio, où le football romain est né.
